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Bilan 2017 & Objectifs 2018, interview croisée des entraîneurs nationaux (1/2)

Bilan 2017 & Objectifs 2018, interview croisée des entraîneurs nationaux (1/2)

Tirer les enseignements de la saison dernière pour revenir encore plus forts l’année prochaine. Analyses, orientations, objectifs : les trois entraîneurs nationaux livrent leur bilan de 2017, et nous disent tout, sur la préparation de 2018. ️

VOTRE souvenir de 2017 ?

Nicolas Becker (entraîneur national paratriathlon) : La pluie !! On l’a eue sur la WPS de Yokohama, au Championnat d’Europe à Kitzbuhel et au Championnat du Monde à Rotterdam ! Plus sérieusement, je retiens 2017 comme l’année de la nouveauté pour le paratriathlon. Un nouveau ranking, et des nouvelles catégories. Je retiens également les belles performances des athlètes, qui ont su courir sur une saison assez longue, puisqu’elle a débuté en avril à Gold Coast et s’est terminée à Rotterdam en septembre. A signaler que les épreuves WPS paratriathlon étaient organisées sur le support des WTS (Gold Coast, Yokohama, Edmonton, Rotterdam); d’où une prestation de qualité. Et bien sûr, les deux titres mondiaux d’Elise et Alexis: une première pour l’équipe de France.

Stéphanie Deanaz (entraîneur national collectif Tokyo) : Les résultats français à Rotterdam : la belle performance de Vincent, qui a une saveur particulière après des années olympiques et post olympiques compliquées. Et l’arrivée au sprint de Raphaël Montoya et Dorian Coninx, qui marque le retour de Raphaël à son meilleur niveau et la bonne santé de la “relève” chez les hommes.

Sébastien Poulet (coordinateur des équipes de France) : L’annonce du relais mixte pour les Jeux de Tokyo, qui ouvre de nouvelles perspectives ! Egalement la transition difficile après 2016 et le fait que les garçons se soient très bien remobilisés après Rio.

Votre bilan pour 2017 ?

Stéphanie Deanaz : Globalement, les garçons ont réalisé une saison pleine. Ils ont su répondre aux objectifs que nous leur avions fixés fin 2016 en stabilisant un niveau de performance sur l’ensemble de la saison puis en élevant ce niveau sur deux courses objectifs. Chez les filles, cette constatation est moins vraie pour la totalité du collectif, pour plusieurs raisons. Elles sont encore jeunes et ont quelques fragilités, mais elles ont globalement réalisé de bonnes choses, elles doivent désormais assurer une stabilité dans leurs résultats.

Sébastien Poulet : Pour une année post olympique, nous avons une belle densité chez les hommes. A 3 ans des prochains jeux, c’est très intéressant ! D’autant plus que 4 de nos hommes ont moins de 24 ans cette année. En vue de Tokyo mais aussi de Paris, c’est un bel effectif qui a de l’avenir. Chez les élites femmes, nous n’avons pas encore cette densité. Nos athlètes sont encore jeunes, mais nous croyons en elles et elles nous démontrent que nos espoirs sont fondés. C’est donc un bilan positif, intéressant à 3 ans des prochains Jeux Olympiques.

Nicolas Becker : Le bilan est très positif ! Les athlètes ont répondu présents sur les courses importantes. Seul le déplacement au Japon ne s’est pas très bien passé pour les paratriathlètes présents. Nous devons donc travailler sur l’optimisation pour arriver performants à Tokyo et laisser le moins de place possible à l’imprévu. Voilà pourquoi un camp de quelques jours est prévu en 2018 en amont de la WPS de Yokohama. Le bilan 2017 est prometteur. Nous gardons cependant tous en tête l’annonce des catégories de handicap retenues pour les JP de Tokyo 2020, prévue fin 2018, qui risque de fermer les portes des Jeux à certains de nos athlètes … j’espère que cela va donner des ailes aux heureux élus.

Les orientations données aux athlètes pour 2018 ?

Stéphanie Deanaz : Chez les garçons, nous allons leur demander d’élever leur niveau plancher pour tout « décaler vers le haut ». Chaque garçon aura des objectifs individualisés qui s’inscriront dans la logique de leur progression. Chez les filles, le niveau plancher et la régularité ne sont pas encore là. Elles subissent encore les scénarii impulsés par une Flora Duffy sur des parcours vélo de plus en plus exigeants, à l’instar de ce que les garçons avaient pu vivre avec les frères Brownlee. Elles manquent de métier à vélo et le payent très cher. Dès la fin de la saison dernière, nous avons mis des choses en place pour leur progression. Mais il va falloir du temps car elles sont jeunes et ont peu d’expérience dans cette discipline. Elles ont de belles qualités à pied et s’en sortent bien dans l’eau mais leurs points faibles à vélo les empêchent encore d’exister sur les courses les plus relevées.

Sebastien Poulet : Elever le niveau plancher ou savoir aborder un objectif et y être performant ? C’est une vraie question que nous nous sommes posée. Suivant les athlètes, et où ils en sont dans leur carrière, ça dépendra. La régularité pour les plus jeunes c’est intéressant, mais pour d’autres ce n’est pas forcément une priorité. Vincent Luis, par exemple, a été un exemple de régularité sur la saison 2015. Il aime aussi être challengé sur une ou deux courses dans l’année. Il nous l’a prouvé cette année à Rotterdam. Cette orientation générale est ensuite à décliner selon les individualités, même si à l’heure actuelle, seul Vincent a acquis une maturité suffisante pour se concentrer sur l’optimisation de sa performance. Pour les autres, il y a beaucoup de secteurs sur lesquels ils doivent progresser. Il faut que chacun élève le curseur, cela passe par un travail toujours plus conséquent et bien orienté au quotidien, selon ce qu’il doit travailler, pour pouvoir rivaliser avec les meilleures et les meilleurs.

Stéphanie Deanaz : Oui, il va y avoir autre chose à gérer en vue de Tokyo : ce long voyage au Japon, ce décalage horaire, … Pour ceux qui ont atteint une certaine régularité, nous allons également leur demander d’être capables d’affiner leur préparation. C’est-à-dire de s’intéresser à la gestion d’un tel événement (jetlag, logistique, …)  pour arriver à Tokyo avec le minimum d’incertitudes.

Nicolas Becker : Pour les paratriathlètes, le but va être d’identifier deux temps forts dans la saison. Pour les plus performants, l’objectif sera de faire une belle course sur la WPS de Yokohama et d’être performants au Championnat du Monde à Gold Coast. Je pense notamment à nos deux champions du Monde, qui ne connaissent pas le Japon et pour qui ce sera une première expérience là-bas. Quant au Championnat du Monde, le but est de les challenger sur une course d’un jour, avec toute la pression qui va avec. Pour le reste du collectif, nous resterons sur une dynamique plus classique avec un objectif de performance sur le Championnat d’Europe et le Championnat du Monde. Et avant toute chose, ils vont devoir se sélectionner pour ces championnats. Nous avons aussi cette problématique de l’annonce des catégories de handicap retenues pour Tokyo 2020, prévue au plus tard pour décembre 2018.

Sébastien Poulet : Cette incertitude change la donne pour les paratriathètes, et notre façon d’appréhender les choses entre la préparation des triathlètes et des paratriathlètes.

Nicolas Becker : Nous voulons que chacun ait sa chance, c’est pour cela que nous allons effectuer un gros travail sur les stages de préparation, pour  s’assurer que toutes et tous seront dans les meilleures conditions en 2018. Comme ça, s’ils sont dans le bon wagon, si leur catégorie est retenue, ils seront prêts ! Chez les élites, toutes et tous vont avoir le droit de rêver. Chez les paratriathlètes, le rêve se terminera courant 2018 pour certains, à l’annonce des catégories retenues, et c’est assez difficile à appréhender.  Car les athlètes s’investissent dans le projet Tokyo, sans savoir si leur catégorie y sera représentée.

Par rapport à 2017, qu’est-ce qu’on garde et qu’est-ce qu’on change ?

Nicolas Becker : J’aurai à mes côtés un entraîneur national qui s’occupera plutôt de la relève. C’est une démarche nouvelle en paratriathlon. Je pourrai compter sur son expertise et cela nous permettra de mieux cibler nos actions. Sinon, on garde l’exigence mais aussi et surtout l’humain dans l’accompagnement. En paratriathlon, l’accès aux courses est difficile : nous avons un beau circuit, mais des critères d’éligibilité en restreignent l’accès. Nous devons donc bien expliquer les choses aux athlètes.

Stéphanie Deanaz : Pour cette olympiade, le collectif Tokyo a été restreint, et parallèlement un groupe relève a été identifié, ce qui permet d’accentuer l’individualisation dans l’accompagnement en vue des épreuves individuelles et du relais. Cela s’inscrit dans cette triple temporalité du court, moyen et long terme. Nous avons aussi prévu de renforcer notre expertise du vélo, ainsi qu’un accompagnement plus important autour des stratégies à adopter sur les courses et leur préparation.

Sébastien Poulet : nous avons en effet une réelle volonté de mieux connaître la discipline du relais mixte par équipe. Empiriquement, nous la connaissons cette épreuve pour y participer régulièrement depuis 9 ans. Maintenant, il nous faut des données objectives, qui vont nous guider dans la définition des profils d’athlètes performants sur cette épreuve. Un travail d’analyse en situation de compétitions sur cette épreuve et des retours / échanges très réguliers avec les sportifs seront menés à partir de cette saison.

Stéphanie Deanaz : nous allons développer un service d’expertise qui va nous permettre d’identifier et surtout de verbaliser les qualités nécessaires pour les différents relayeurs et aider les athlètes à travailler dans le bon sens, pour qu’ils s’inscrivent aussi dans une position de relayeur.

Sébastien Poulet : Nous partons sur 2018 avec une ambition de résultats à Tokyo. C’est un fil conducteur sur toute l’olympiade, qui commence dès cette saison. Nous allons donc retranscrire cette exigence dans les sélections par exemple. Et puis il y a cette nouveauté du relais que nous devons appréhender. Il va falloir concilier les exigences, pour avoir des sportifs qui répondent à la double commande épreuve relais et/ou épreuve individuelle. Cette double exigence change un peu les choses : comment les sportifs doivent l’intégrer dans leur entraînement et leur projet ? Et comment nous, dans l’encadrement, nous appréhendons cette nouvelle donnée ? Cela va forcément orienter des choix de compétitions par exemple.

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